Interrogeant tout ce qu’il existe de mystique dans les grands textes, Luminitza C. Tigirlas ne se laisse pas prendre au décalage que cette thématique tend. Elle sait par sa poésie comme par ses analyses descendre dans “lalangue” chère à Lacan et chercher la “differance” (Derrida) que cela engendre de palpitant en secondes et tierces sous l’apparente ligne de conduite de tout discours et sa politique (du monde ou du “ciel”).
Fidèle dans l’esprit à Beckett mais choisissant une voie moins anorexique que la sienne, elle montre les farces de l’angoisse et de l’extase (deux bouts de la même ficelle). Elle précise — mais surtout en sourdine — que l’amour et son exigence restent malgré tout sacrément “genrés” comme cela se dit maintenant. Entre la coupe et les lèvres, suivant qui tient la première et qui tend les secondes la mise n’est pas la même… D’un côté le mur, la descente au tombeau mallarméen, de l’autre le passage obligé du sacrifice avant que surgisse chez la femme le renversement des dialectiques animâles.
Luminitza C. Tigirlas, Avec Lucian Blaga, poète de l’autre mémoire, Editions du Cygne, coll. Portraits littéraires, Paris, 2019, 110 p. — 13,00 €.
Entretien :
Qu’est-ce qui vous fait lever le matin ?
Le merle blanc.
Que sont devenus vos rêves d’enfant ?
Parfois, des poèmes.
A quoi avez-vous renoncé ?
À convaincre l’autre.
D’où venez-vous ?
D’une pluie de fleurs de cuivre, d’un exil dans l’alphabet de l’autre et d’un village dans la vallée des noyers parlants.
Qu’avez-vous reçu en dot ?
Une ballade roumaine, “Le Maître Manole” de la bouche de ma grand-mère maternelle.