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Jour de plomb
il n’y a plus de ciel
les fusées l’ont fendu.
Sommes-nous encore au monde ?
Les aubes se meurent avant de naître
le temps descend tout bas
tout bas trébuche la lumière
Jours de plomb
aux pennes aux oiseaux
aux vols en grève de l’oubli, en grève
( © Luminitza C. Tigirlas, En grève de l'oubli,
in Autres poèmes de la soif matinale, Série d'inédits, 2022. © Tous droits réservés )
Je remercie du coeur Les Co-llecteurs de Montpellier
pour leur si aimable invitation de présenter, mes poèmes, mes livres,
de répondre aux questions de François Szabo.
Nous vous attendons nombreux le 19 mars à 14h30
au Petit Théâtre du Gazette Café, 6 rue Levat Montpellier 34000.
Pour lire plus, merci de cliquer sur le lien suivant:
https://printempsdespoetes.com/Luminitza-C-Tigirlas-Le-Sel-de-la-vie
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Je remercie du coeur Les Co-llecteurs de Montpellier
pour leur si aimable invitation de présenter, mes poèmes, mes livres,
de répondre aux questions de François Szabo.
Nous vous attendons nombreux le 19 mars à 14h30.
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C'est le titre de mon article contre la guerre publié sur le site de la Fondation Européenne de psychanalyse:
La paix, telle la rose d’Angelus Silesius, est-elle sans pourquoi ?
Peut-elle fleurir parce qu’elle fleurit ?
La paix peut-elle s’épanouir sans que nous, les humains, ne renonçons à perdre de notre jouissance de se voir comme Un, sans que nous acceptions à cette dépense hors garanties contre un Réel illimité ?
Mercredi 23 février 2022--- j’ai commencé à rédiger une Note de lecture que j’intitulais « Euphorie au-dessus du réel. En lisant Charles Melman, Jean-Pierre Lebrun, La dysphorie de genre : à quoi se tenir pour ne pas glisser ?, érès, 2022 » et dans laquelle j’avançais :
« Vingt ans après leur entretien « L’homme sans gravité », ces deux interlocuteurs rodés à l’exercice, se retrouvent devant les réminiscences du « jouir à tout prix », impératif qu’ils interrogent par le biais de la toute-puissance infantile devenue inentamable. De ne plus recevoir des limites parentales, ni sociétales amène l’enfant qui grandit à ne plus renoncer même à l’âge adulte à la toute-puissance que produit la sexualité.
Ce nouveau dialogue des deux psychanalystes est provoqué par la sortie de Petite fille, film de Sébastien Lifshitz, dans lequel Sacha, 8 ans, né garçon, dit se vivre comme une fille depuis ses 3 ans. Pour avoir moi-même été interloquée par ce film, je comprends ce qui a mis au travail nos collègues et leur désir de partager cette préoccupation avec un public laissé dans la confusion par le traitement du sujet. Selon Ch. Melman, avec la science, nous sommes en mouvement vers « la maîtrise du réel » et « pourquoi pas le choix de son sexe », donc, à mon sens : pourquoi pas le TOUT d’un maître du monde ? »
Une journée paisible.
Le matin du jeudi 24 février, avant de me remettre à mon texte de réflexion sur le non-renoncement à la toute-puissance infantile, j’ai ouvert un courriel d’Helene L'Heuillet, l’invitée de mon séminaire du 12.02.22 « Vérité et acte du sujet dit psychotique », où nous avions évoqué le risque de guerre. Le 24.02.22, Hélène m’écrivait : « Bon courage pour vous, chère Luminitza Tigirlas, et pour les vôtres vivant en Moldavie. »
Le fil des actualités m’a confirmé : tout avait basculé à l’aube de ce jour de 24 février 2022, rien ne pouvait plus se poursuivre comme la veille,
lorsque la guerre en Ukraine était encore une menace à laquelle on n’avait aucune envie de croire.
L’âme meurtri,
dans l’impuissance devant la folie belliqueuse de Poutine
qui attaque brutalement
afin de soumettre l’Ukraine à sa jouissance dictatoriale,
je relis Ossip Mandelstam, poète proscris, accusé de « ne pas avoir fait corps avec la révolution ».
Le Staline de ses poèmes est reconnaissable dans le Poutine de nos cauchemars éveillés.
***
Printemps froid. La sans pain, la craintive Crimée,
Comme sous Wrangel – et pareillement coupable.
Chiens bergers sur le sol. Loques rapiécées.
Et la même morsure de fumée acide.
Mais beaux comme toujours les lointains, comme absents,
les arbres, leurs bourgeons sur le point d’éclater,
sont comme des intrus, et fait pitié à voir,
l’amandier qu’embellit la bêtise pascale.
La nature ne reconnaît pas son visage
et terribles sont les ombres de Kouban, d’Ukraine…
Des paysans faméliques, sur le sol de feutre,
gardent la porte, ne touchent pas à la clé.
(Ossip Mandelstam, mai 1933, Stary Krym)
La même année 1933, en novembre, le poète interdit par le régime stalinien, écrit :
***
Nous vivons sans sentir sous nos pieds le pays,
à dix pas ne sont plus audibles nos paroles,
mais là où la parole à demi-mot suffit
c’est lui, le montagnard du Kremlin, qu’on évoque.
Ses doigts épais sont gras comme des vers de terre,
ses mots, infaillibles comme des poids d’un poud.
Parmi ses moustaches ricanent des cafards
et les tiges de ses bottes sont des miroirs.
L’entoure une racaille de chefs au cou frêle,
sous-hommes dont il use comme de jouets.
Un qui siffle, un autre qui miaule, un qui pleurniche,
lui seul s’amuse en père fouettard et tutoie.
Il forge, comme fer à cheval, ses oukases –
frappe, qui à l’aine, qui au front, qui à l’œil.
Toute mise à mort est pour lui délectation
et fait se dilater sa poitrine d’Ossète.
(Ossip Mandelstam, Œuvres poétiques, Le bruit du temps, 2018, p. 427 et p. 439)
Le 26 février, les yeux rivés sur le flux des informations de guerre, je tombe sur une réponse de François Heisbourg, Conseiller à la Fondation pour la recherche stratégique, qui précise dans une interview du 26 février 2022 :
« La Moldavie est elle aussi menacée ? - Oui, l’état tampon risque fort de disparaître. C’est la deuxième étape géographique par rapport à l’Ukraine. Je ne pense pas qu’il va se priver du plaisir de manger tout cru une Moldavie qui est elle-même politiquement et sociétalement très divisée. Et là, des soldats français seront face à face avec des soldats russes. À la frontière roumaine. Aujourd’hui la Moldavie est dans une phase pro-occidentale, mais c’est comme en Ukraine, c’est fragile. »
https://www.les ambitions de poutine sont plus larges
À la lecture de ces prévisions funestes, mon cœur saigne d’autant plus que je suis roumaine née en Moldova orientale, morceau de terre de la Roumanie ancienne, terre annexée par la Russie à plusieurs reprises. Avant d’être psychanalyste, je suis une poète de langue française, survivante de l’assimilation linguistique en URSS.
Actuellement la République de Moldavie est encore indépendante…, mon pays d’origine offre abri aux refugiés qui affluent de l’Ukraine.
L’exode n’a jamais pris fin depuis la nuit des temps.
En 1932 Einstein voulant être éclairé sur le « besoin d’haïr et d’anéantir », prédisposition latente de l’homme qui « peut être réveillée avec une relative facilité et s’intensifier en psychose de masse » se tournait vers Freud : « Y a-t-il une possibilité de diriger le développement psychique des hommes de manière à ce qu’ils deviennent davantage capables de résistance face aux psychoses de haine et d’anéantissement ? »
Qu’est-ce qui aujourd’hui reste encore valable de la réponse de Freud dans « Pourquoi la guerre ? »
D’après Freud, « la guerre est, de la façon la plus criante en contradiction avec les positions psychiques que le procès culturel nous impose, c’est pourquoi nous ne pouvons que nous indigner contre elle, tout simplement nous ne la supportons plus, ce n’est pas seulement une récusation intellectuelle et affective, c’est chez nous autres pacifistes une intolérance constitutionnelle, une idiosyncrasie en quelque sorte poussée à l’extrême. Et il semble bien que les avilissements esthétiques de la guerre n’ont pas une moindre part dans notre révolte que ses cruautés.
Combien de temps nous faut-il encore attendre avant que les autres aussi deviennent pacifistes ? On ne saura le dire, mais peut-être n’est-il pas utopique d’espérer que l’influence de ces deux facteurs, la position culturelle et l’angoisse justifiée devant les effets d’une guerre future, mettra fin à la pratique de la guerre dans avenir à portée de vue. » (S. Freud, Œuvres complètes, Tome XIX, PUF, 2004, p. 81.)
Pouvons-nous toujours affirmer suite à Freud qu’il nous ai permis de dire : « tout ce qui promeut le développement culturel travaille du même coup contre la guerre » alors que l’œuvre d’humanisation pacifiste semble vouée au ratage par la toute-puissance infantile devenue inentamable ?
Avec le malaise actuel dans la civilisation, les monstres de la violence au pouvoir sans limite et leurs passages à l’acte sont-ils de plus en plus inévitables ?
Luminitza CLAUDEPIERRE TIGIRLAS, Poète
Psychanalyste à Montpellier, membre de l’A. L. I. et de la FEP,
Docteure en Psychopathologie de Paris 7.
Montpellier, le 26 février 2022
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Le sixième jour à Kiev
la paix envoie de perce-neige en avant,
leurs clochettes maculées de vert.
Leurs têtes étonnées
prennent feu
dans les mains des enfants.
Ils ne grandiront plus au bord de Dnipro
Ce n’est pas le ciel qui se trompe de couleurs,
en Ukraine la neige est sanguine.
Un maître se déchaîne, il piétine, il piétine
Où sont nos souffles ?
Rouges débris du Kremlin
pulvérisent la paix,
pulvérisent les perce-neige,
pulvérisent
les rives, le fleuve, le jour de Martisor
Luminitza C. Tigirlas,
Montpellier, le 1 mars 2022.
( © Luminitza C. Tigirlas, Un premier mars sans paix,
in Autres poèmes de la soif matinale, Série d'inédits, 2022. © Tous droits réservés )
Tressé en fil de soie blanc et rouge, on porte le Martisor à la poitrineen signe de victoire du printemps contre l'hiver.Je ne le porte pas ce premier mars lorsque la tyrannie continue à attaquer l'Ukraine,aujourd'hui mon Martisor est poème.Le 19 mars 2022, à l'invitation des CO-LECTEURS,
je lirai mes poèmes et répondrai aux questions sur mes livres
au Petit Théâtre du Gazette-Café,
je vous donne rendez-vous à 14h30 au 6, rue Levat, Montpellier.
Voir ci-dessous:
https://printempsdespoetes.com/Luminitza-C-Tigirlas-Le-Sel-de-la-vie
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L'inoubliable bruit du temps ... avec Ossip Mandelstam
Mon âme meurtrie, dans l’impuissance devant la folie belliqueuse de Poutine qui attaque pour soumettre l’Ukraine à sa jouissance dictatoriale,
je lis Ossip Mandelstam, poète proscris, accusé de « ne pas avoir fait corps avec la révolution ».
Le tyran Staline de ses poèmes est reconnaissable dans le Poutine de nos cauchemars:
Printemps froid. La sans pain, la craintive Crimée,
Comme sous Wrangel – et pareillement coupable.
Chiens bergers sur le sol. Loques rapiécées.
Et la même morsure de fumée acide.
Mais beaux comme toujours les lointains, comme absents,
les arbres, leurs bourgeons sur le point d’éclater,
sont comme des intrus, et fait pitié à voir,
l’amandier qu’embellit la bêtise pascale.
La nature ne reconnaît pas son visage
et terribles sont les ombres de Kouban, d’Ukraine…
Des paysans faméliques, sur le sol de feutre,
gardent la porte, ne touchent pas à la clé.
Ossip Mandelstam, mai 1933, Stary Krym
La même année 1933, en novembre, le poète interdit par le régime stalinien, écrit :
Nous vivons sans sentir sous nos pieds le pays,
à dix pas ne sont plus audibles nos paroles,
mais là où la parole à demi-mot suffit
c’est lui, le montagnard du Kremlin, qu’on évoque.
Ses doigts épais sont gras comme des vers de terre,
ses mots, infaillibles comme des poids d’un poud.
Parmi ses moustaches ricanent des cafards
et les tiges de ses bottes sont des miroirs.
L’entoure une racaille de chefs au cou frêle,
sous-hommes dont il use comme de jouets.
Un qui siffle, un autre qui miaule, un qui pleurniche,
lui seul s’amuse en père fouettard et tutoie.
Il forge, comme fer à cheval, ses oukases –
frappe, qui à l’aine, qui au front, qui à l’œil.
Toute mise à mort est pour lui délectation
et fait se dilater sa poitrine d’Ossète.
(Ossip Mandelstam, Œuvres poétiques, Le bruit du temps, 2018, p. 427 et p. 439)
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Je vous invite à lire sur le site de l'A.L.I. notre entretien avec le poète James Sacré à propos de son rapport à l’écriture. Ce texte est issu de la Séance du 25 novembre 2021 du Séminaire « CRÉATION & PSYCHANALYSE : RÉVERBERATIONS. La poésie à gorge déployée » qui a lieu à Montpellier.
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Luminitza C. Tigirlas, Eau prisonnière,
collection Poésie du XXI siècle,
Jacques André éditeur, 2022.
Instants de métamorphose ajourent les poèmes de ce livre lorsque les mots libèrent une eau prisonnière, l’eau qui nous vient à la bouche avec le goût de vivre. Parfois inhibée, exclue de la mémoire, retenue et séparée dans l’écluse imaginaire du temps, c’est aussi l’eau de la soif d’amour et de l’attente ineffable.
Se tenant sur un sol instable, un corps se déploie, il se dresse vers la lumière qui nous console, nous revigore par un don de parole : des embouchures apatrides / attendent tes lèvres / pour souffler la fin de l’exode.
Ce nouveau livre de poésie,
qui voit enfin le jour en janvier 2022, m'est particulièrement cher
par une compagnie qui m'honore:
car par ailleurs c'est grâce à Jacques André éditeur que la poésie de Lucian Blaga, poète roumain inscrit dans l'infini, paraît intégralement en France dans une somptueuse édition bilingue.
Le livre "Eau prisonnière" peut être commandé en librairies et de préférence chez l'éditeur sans frais de port :
https://www.jacques-andre-editeur.eu/auteur/luminitza-c-tigirlas/
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